vendredi 21 décembre 2007

L'homme aux rats


Quand il n'y a le choix qu'entre le néant (en costume noir) et le vide (en tailleur blanc)...

Quand c'est le néant, bien entendu, qui gagne...

Quand en fait de culture, il y a Mireille Mathieu, et en guise de sortie gastronomique, une virée au Macdo d'Eurodisney...

Quand on dénonce, au plus haut niveau, l'"esprit de jouissance" de mai 68, qu'on appelle à redécouvrir les vertus du travail(ler plus pour gagner plus, ben voyons), de la famille (recomposée et "naturellement hétérosexuelle", avec un dictateur à chapka pour témoin), et de la patrie (forcément glorieuse, puisque toute repentance est officiellement interdite: la conscience morale, et pire encore, la conscience politique, voilà de nos jours la véritable obscénité)...

Quand, dans le même temps, les actualités nous apprennent jour après jour que tout devient bel et bien possible dès qu'il s'agit d'argent, de l'argent des autres, cela va de soi...

Quand l'université agonise, désertée par des étudiants qui ont fini par comprendre à quel point on les méprise, hantée par quelques enseignants qui commencent enfin à s'en douter, régentée tant bien que mal par des présidents sans autorité ni autre projet que d'"accompagner" les "réformes", malmenée par un ministère que gangrène la technocratie et le pseudo-pouvoir des soi-disant "experts"...

Quand penser (c'était déjà un luxe) devient un risque...

Alors commence pour de bon le règne de l'homme aux rats.

"Le rat est celui qui, interne à la temporalité d'opinion, ne peut supporter d'attendre. Le prochain tour commandé par l'Etat, c'est très loin. Je vieillis, se dit le rat. Lui, il ne veut pas mariner dans l'impuissance, mais encore moins dans l'impossible! L'impossible, très peu pour lui.

Il faut reconnaître à Sarkozy une profonde connaissance de la subjectivité des rats. Il les attire avec virtuosité. Peut-être a-t-il été rat lui-même? En 1995, quand, trop pressé d'en venir aux choses ministérielles sérieuses, il a trahi Chirac pour Balladur? En tout cas, trouvant les usages d'Etat de la psychologie du rat, il mérite un nom psychanalytiquement fameux. Je propose de nommer Nicolas Sarkozy "l'homme aux rats". Oui, c'est juste, c'est mérité.

Le rat est celui qui a besoin de se précipiter dans la durée qu'on lui offre, sans être du tout en état de construire une autre durée. […] N'être ni rat ni déprimé, c'est construire un temps autre que celui auquel l'Etat, ou l'état de la situation, nous assigne. Donc un temps impossible, mais qui sera notre temps." (Alain Badiou, De quoi Sarkozy est-il le nom?, Paris, Nouvelles Editions Lignes, 2007, pp. 47-48.)

Au travail. Construisons.

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